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Biographies

La famille Keogh

par Francis Ducharme

La famille Keogh représente trois générations de marionnettistes : d’abord Violet et David, couple fondateur des Kay Marionnettes en 1929, puis John et Linda, avec le Canadian Puppet Theatre, créé en 1945, et enfin Nina, dont la carrière s’est  déroulée principalement à la télévision canadienne, à partir de 1968.

L’histoire de cette dynastie s’amorce à Toronto en 1928 avec les Kay Marionettes (1928-1936), fondées par Violet et David Keogh, le mari rejoignant son épouse dans un art qu’elle pratique depuis 1925. Elle fabrique les marionnettes à fils, tandis que lui s’occupe d’autres aspects techniques. Le nombre de spectacles et d’artistes impliqués augmente quand Muriel Heddle les rejoint, en 1933, après avoir été l’assistante de Rosalynde Osborne. La compagnie est renommée les Kay-Heddle Marionettes (1936-1939), un indice des habiletés de la collaboratrice pour la fabrication de marionnettes, les ballets marionnettiques et l’intégration de la marionnette à des concerts classiques. Si les Keogh suspendent leurs activités durant la guerre, Muriel Heddle continue avec sa propre compagnie de tournée, The Royal Canadian Puppet Ballet (1939-1942), qui voyage au Canada et aux États-Unis,  jusqu’à leur entrée en guerre.

Muriel Heddle. Digitized Graphic Material from Canadian Museum of Civilization Archives.

John et Linda Keogh, la poursuite d’une tradition familiale

John, le fils de Violet et David Keogh, puis son épouse, née Linda Aliman, assistent leurs parents dans leurs activités de marionnettistes dans les années 1930. Outre la transmission familiale du métier, le travail sur le mouvement et la musique (auquel Muriel Heddle les a sans doute sensibilisés) s’enrichit par des études de ballet. Après la guerre, ils reprennent les activités des parents Keogh en fondant le Canadian Puppet Theatre (1945-1968). Linda Keogh a d’ailleurs dansé pour Boris Volkoff, un pionnier de la danse classique au Canada.Les deux générations de Keogh développent un circuit de tournées inspirées par le mode de diffusion des marionnettistes états-uniens, popularisé notamment par la compagnie de Tony Sarg (aux spectacles créés entre 1915 et 1939) : les tournées sont commanditées par d’importantes industries dont elles font la promotion, par exemple, les spectacles de John et Linda sont intitulés The Shell Show, pour la pétrolière Shell. Leurs spectacles locaux sont des attractions parmi celles de l’Exposition nationale canadienne de Toronto ou d’autres foires, ou bien ils sont présentés sur une plateforme au-dessus de l’orchestre pendant plusieurs concerts de l’Orchestre symphonique de Toronto.

Couverture du Toronto Star avec Nina Keogh. Photo tirée de la page Facebook Keogh Studio

Les réalisations du Canadian Puppet Theatre

Le Canadian Puppet Theatre établit en 1961 le premier lieu théâtral permanent dédié à la marionnette en Ontario; d’abord une tente (1961-1962), puis un théâtre en bois (1963-1965), qui sera animé ensuite par le tandem Leo et Dora Velleman (1966-1968). C’est un centre récréatif actif durant la saison estivale sur l’une des îles de Toronto dans un contexte où les compagnies ontariennes de théâtre d’été se font nombreuses. Le public de John et Linda Keogh s’élargit quand ils deviennent marionnettistes dans les émissions pour enfants des deux premières décennies de CBC, notamment en animant les nombreux animaux dans Maggie Muggins (1955-1962), telle la souris Fitzgerald, et en popularisant la marionnette à gueule Howard the turtle dans Razzle Dazzle (1961-1966). Leurs spectacles de marionnettes, à gaine et surtout à fils, sont le plus souvent conçus comme des assemblages de variétés, incluant de courtes adaptations comiques de contes de fées, comme le faisaient les parents Keogh. Le sommet de leur carrière scénique est Plaisir et fantaisie, une adaptation de Everyman impliquant 51 marionnettes, présentée dans les deux langues à Montréal dans le cadre de l’Expo 67, dans un mini-théâtre de 210 sièges, pour près de 3400 représentations de 15 minutes en vingt semaines (24 fois par journée de 12 heures, 7 jours par semaine). Ils cessent leurs activités l’année suivante, après avoir transmis le métier à leur fille, Nina Keogh, qui devient elle aussi marionnettiste à la télévision.

Nina Keogh et une marionnette. Photo tirée de la page Facebook de Keogh Studio

Bibliographie
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CRABB, Michael, « Boris Vladimirovich Volkoff », L’Encyclopédie canadienne, 2014 [2007], en ligne.
FLEGEL, Loretta, Parts in play : the Rosalynde Osborne Stearn Collection at McGill University, mémoire de maîtrise, Université Concordia, 2003.
LÉGARÉ, Céline, « Mon baluchon de nouveautés », La Patrie, 9 avril 1967, p. 20, copie en ligne numérisée par BAnQ.
LEGENDRE, Micheline, Marionnettes, Art et Tradition, Montréal, Leméac, 1986.
MCKAY, Kenneth B., Puppetry in Canada : An Art to Enchant, Toronto, Ontario Puppetry Association Publishing Company, 1980.
MCPHARLIN, Paul et Marjorie Batcheldor McPharlin, The Puppet Theatre in America, Boston, Plays Inc., 1969 [1949].
RUMP, Eric S., « Drama : English Canada », dans John Saywell (éd.), Canadian Annual Review for 1964, Toronto, University of Toronto Press, 1965, p. 453-462.